Une brèche s’est ouverte dans l’histoire collective ces trois derniers mois, quelque chose a été touché, s’est éveillé dans l’ADN de notre humanité et c’est irréversible. Que nous ayons poursuivi notre mode de vie précédent ou que nous soyons devenus des « adeptes du confinement », la vie sera à présent différente même si nous tentons de l’étouffer via une nouvelle suractivité. Une qualité nouvelle s’est développée. La percevez-vous ? Voyez vous ce qui appelle encore à grandir à l’intérieur de l’Être, cette poussée qui demande à écarter l’ancien, à libérer les vieux murs et à ne pas chercher autre chose qu’écouter, encore et encore ce qui résulte que nombre d’entre nous sont comme « les résistants du déconfinement » ?
Entendez-vous le son particulier de la terre nouvelle qui s’est dévoilée au cœur de l’Être pendant ces cinquante cinq jours d’arrêt ? Avez-vous perçu cette mémoire lointaine qui s’est éveillée laissant passer les perceptions de quelque chose d’autre sans pouvoir vraiment le nommer ?
Peut-être est-ce la mémoire d’une terre originelle qui respire et vit paisiblement qui serait revenue à notre conscience à la vue de rivières plus limpides, d’un ciel d’un bleu « étonnant » là où il est « normal » que le ciel soit d’un bleu lumineux lorsqu’il est libre de toute pollution ? Peut-être avons-nous senti avec plus d’acuïté la grande étoffe qui nous relie tous au cœur de notre humanité ? Ou encore avons-nous œuvré ou été touché par le don, l’offrande, le service, l’attention et le soin vers les plus fragiles et les plus démunis, nous dévoilant de manière plus visible encore cette communauté de destin que nous partageons au sein de notre humanité ?
Notre expérience nous a t’elle amené à être doucement embarqué dans ce temps hors du temps, par la présence nourrissante d’une nature épanouie ? Avons-nous été surpris par une joie s’amplifiant jour après jour de prendre soin de son jardin intérieur et extérieur, voir de quelques fleurs sur son balcon ? Avons-nous apprécié de prendre le temps d’écrire, de méditer, d’échanger au téléphone ou tout autre mode de communication ? Avons-nous goûté l’expérience de nous relier avec certains êtres perdus de vue voir de guérir ou approfondir certaines de nos relations ? Peut-être avons-nous découvert des parties de notre Être en jachère depuis bien longtemps ? Ou encore éveillé voir soulevé des voiles et appris de nouveaux talents ? A moins que nous ayons tenté de comprendre et saisir le fil de la complexité des évènements pour finir et fermer l’ordinateur en soupirant « Je n’y comprends rien … » ?
Ou peut-être avons nous choisi de travailler beaucoup ? Du reste, ai-je vraiment choisi ou me suis-je laissé emporter par un mouvement bien malgré moi qui me poussait à accomplir quelque chose dans ce temps qui m’était donné où le futur disparaissait jour après jour pour me livrer à un présent avec lequel je n'imaginais pas une seconde demeurer ?
Enfin ou pas … le 10 mai est arrivé.
Un grand silence s’est déposé sur Paris ce dimanche. La veille un gros orage avec éclairs, tonnerre et pluie s’abattaient sur la ville pendant une partie de la nuit, lavant les trottoirs et offrant l’humidité à la terre asséchée, bénédiction !. Là où la veille le bruit des voitures se faisaient à nouveau entendre, les piétons plus nombreux, un ciel gris donnait une ambiance feutrée à ce moment particulier. Comme si une dépression passagère prenaient les trippes de nombre d’entre nous à un « retour éventuel » à l’avant, là où nous n’avions qu’un élan, celui d’un renouveau au cœur d’un présent revitalisé par cet arrêt sur image et cette bifurcation de notre destin collectif.
Que reste t’il de cette brèche au cœur du vivant après ces quelques jours ?
Une fenêtre s’est ouverte sur une planète qui respirait un air non vicié. Nous avons vécu parfois le calme, la beauté et un rapport au temps libéré. Et tandis que la vie rusait pour nous inviter à un grand pas de côté et un retour sur soi, un grand Jardin Planétaire s’est offert à nous alors que nous étions « réfugiés dans nos demeures ». Puis nous sommes sortis à nouveau …
La brèche reste ouverte sur une question qui m'apparaît régulièrement : « Serons-nous capables de vivre un jour en communauté de destin avec ce grand Jardin Planétaire ou la nature devra t’elle forcément laisser la place à l’humain ou vice versa ? Allons-nous réussir une nouvelle alliance d’un vivre ensemble où l’attention à l’autre, la présence, l’écoute et le respect ne seront plus des thématiques soulevées régulièrement mais seront devenues l'évidence du grand choeur que nous formons ?
A voir cette photo, le coeur sait bien comment se relier au-delà des murs ...
Serait-ce un premier pas vers cette nouvelle alliance ?