Gare Saint Charles ce soir à Marseille, un homme est installé devant un piano noir brillant. Il explore quelques notes avant d'entrer en profonde communion avec l'espace en lui qui sait que la musique est don et qu'elle n'attend que lui pour s'offrir au monde. Dès cet instant, il semble habité d'une énergie nouvelle et son corps vibre et répond à ce qui le traverse.
L'ambiance est particulière, les gens s'arrêtent, se regardent en silence et s'invitent d'abord timidement à la beauté de l'instant. La mélodie efface le temps, passé et futur ne font qu'un, nous sommes devenus les funambules du temps.
Le présent prend dès lors toute la place, le groupe grandit et bénit en silence ces notes qui s'élancent dans la gare les unes après les autres et installent peu à peu un nouveau champ. Celui d'un instant tout neuf, d'un temps où les yeux brillent et les esprits s'éclairent à l'écoute de ces croches qui dansent telles des voluptes vers un lieu inconnu, une trame invisible. La vie nous réunit, nous sommes devenus les funambules du ciel et de la terre. Déjà un nouvel arc-en-ciel s'offre sous nos pieds, non pas pour effacer, mais pour honorer cette rencontre qui nous permet dans le silence une reliance invisible et oh combien puissante.
Un monsieur à barbe blanche mime une danse dont lui seul a le secret. Son corps s'anime, il perd son âge et gagne en joie. Les sourires apparaissent sur les visages, les yeux deviennent complices et brillants en cet instant de grâce.
Nous sommes les funambules de la vie et nous dansons sur l'arc-en-ciel des moments qui nous sont offerts à partager si nous nous arrêtons.
Gratitude à cet homme et à ces doigts sur le clavier qui ont co-crées cet instant de reliance, animés qu'ils étaient, par l'esprit de la musique.